« Ça fait un peu dîner de con : je passe mes journées à travailler sur les économies d’énergies. Et dans ma
vie privée, je remets ça. » Adrien Couzinier est auditeur énergétique auprès des services industriels de Genève
maîtrise de leur consommation d’énergie). Il y a quelques années, ce Bellegardien s’est lancé dans un projet
étonnant : consigner au quotidien les émissions de gaz à effet de serre causées par ses activités pour calculer
son bilan carbone personnel.
Le concept est simple, comme l’explique le jeune homme : « Il s’agit d’un simple tableau Excel dans lequel on
peut par exemple renseigner le nombre de kilomètres parcourus en voiture, la puissance du véhicule et son
type de carburant. De la même façon, on va également indiquer le nombre de kilomètres effectués en avion
ou en transports en commun… »
Des transports à l’alimentation, en passant par le logement et les objets d’usine…
Les distances parcourues via des modes de transport différents seront ensuite converties en émission de gaz
à effet de serre, c’est-à-dire, en quantité de CO2 émis dans l’atmosphère. L’ensemble est ensuite additionné
pour obtenir un total par année. Enfin, le Bellegardien va
effectuer le même procédé, non seulement pour ses déplacements motorisés, mais aussi pour sa
consommation d’énergie liée au logement, à l’alimentation ou aux achats de tous types d’objets fabriqués en
usine.
Éviter les vols longs courriers
Bien entendu, en calculant son bilan carbone, Adrien a très rapidement influé sur son mode de vie pour
réduire
ses émissions. Il explique : « Dans un premier temps, j’ai dû faire une croix sur les vacances dans des pays
trop lointains. Je m’autorise un voyage en avion par an, mais
il faut une destination à moins de 1 500 kilomètres. »
Quatre ans pour atteindre un bilan carbone durable
Le Bellegardien précise qu’un seul aller et retour par avion entre Paris et New York, équivaut à la totalité des
gaz à effet de serre qu’il émet en une année ! « Cela voudrait dire qu’ensuite, si je veux respecter mon quota,
je n’aurais plus le droit de me chauffer, de me nourrir avec
des aliments d’origine industrielle, d’acheter des objets fabriqués en usine ou de prendre n’importe quel
moyen de transport… »
Pour Adrien, il est relativement facile d’améliorer son bilan carbone, du moins au début : « Quand on
consomme beaucoup, les premières économies sont faciles à faire. En soignant son alimentation, en faisant
attention à son chauffage ou en arrêtant de prendre la voiture. Les gens
pensent souvent que c’est trop dur, presque impossible. Il m’a fallu quatre ou cinq ans pour arriver à un bilan
carbone à peu près durable. Alors, c’est vrai qu’on ne peut pas le faire
en deux minutes ! »
2,4 tonnes
L’an dernier, Adrien a calculé qu’il avait émis environ 2,4 tonnes de CO2 (alors qu’un français moyen émet un
peu moins de 8 tonnes par an). D’après le Bellegardien, l’objectif pour un développement durable et équitable
serait d’atteindre 1,8 tonne pour tous les habitants du monde :
« Ainsi, on émettrait suffisamment peu de gaz à effet de serre pour que la planète puisse les absorber
naturellement. »
Ils ont mis au point leur propre outil de calcul
L’outil développé par Adrien Couzinier et les membres de l’association Avenir climatique permet, au terme de la saisie, de consulter ses émissions par catégorie pour mieux les réduire.
« On s’est rendu compte qu’il n’y avait pas d’outil destiné au grand public permettant de calculer son bilan
carbone facilement ou alors, que les outils existants n’étaient pas fiables. L’Agence de l’environnement et de la
maîtrise de l’énergie (Ademe) proposait notamment un programme mais les informations qu’il était possible de
rentrer étaient trop vagues, si bien que les résultats
n’étaient pas pertinents », explique Adrien Couzinier.
Avec les autres adhérents de l’association Avenir climatique, le Bellegardien s’est donc investi dans la création
d’un outil de calcul des émissions de gaz à effet de serre en se basant sur deux impératifs : qu’il soit simple de
fonctionnement et agréable à utiliser.
Un calcul basé sur diverses études scientifiques
« On s’est basé sur plusieurs études scientifiques. Par exemple, l’Ademe propose un livre de plusieurs
centaines de pages dans lequel on trouve l’équivalant CO2 de quasiment tous les aliments disponibles dans le
commerce en France », rapporte Adrien.
Le garçon précise également qu’il est possible de se procurer les analyses de cycle de vie de tous les objets
et
matériaux, de l’ampoule à la poutre en bois, en passant par le produit isolant, se rapportant au secteur du
bâtiment : « Les fabricants calculent le coût carbone de tous ces objets. En tant que professionnel, il est
possible d’avoir accès à ces bases de données, ce qui permet de calculer pas exemple, le bilan carbone
d’une maison. »
Un retour à la Préhistoire ?
C’est une question, qu’Adrien a l’habitude d’entendre : réduire ses émissions de gaz à effet de serre est-il
synonyme de
retour à la Préhistoire ? Aussitôt, la réponse fuse : «On ne reviendra jamais en arrière puisqu’il est question
de bâtir
l’avenir.»
Touner son alimentation vers des produits végétariens et locaux
Concrètement, outre les transports (voiture remplacée par le vélo et une croix sur les vols longs courriers), le
Bellegardien
explique comment il a adapté son alimentation, en la basant sur des produits végétariens et locaux. Au menu
donc : parfois un peu de viande blanche et le moins possible
de
viande rouge (dont la production est très énergivore), même si le garçon concède «s’autoriser une côte
de bœuf une fois
par mois».
Privilégier les circuits de redistribution pour éviter l’achat de neuf
Enfin, concernant les produits manufacturés : « Au lieu d’acheter du neuf, j’achète de l’occasion.
J’utilise beaucoup les circuits de redistribution : Emmaüs, les scouts de France... L’objectif étant
d’éviter d’acheter des objets neufs qui ont nécessité de l’énergie pour leur fabrication et ont donc
entraîné des émissions de gaz à effet de serre.»
Pour le reste, le Bellegardien avoue posséder trois ordinateurs, tous achetés d’occasion. Même
en s’interdisant certains actes
de consommation, pas question donc, de vivre à l’arrêt.
Hugo Charpentier