Pas bonne presse ces temps ci d'évoquer des sujets qui fâchent ..mais un peu plus un peu moins, au point de marasme où nous en sommes, remercions encore et toujours Pierre Jean Llorens car cet article là se partage ...
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Les véritables définitions économiquesLes finances publiques ne se gèrent ni en « bon père de famille », ni comme « un chef d’entreprise », car la fonction économique de l’Etat est spécifique et différente de celle d’un ménage ou d’une entreprise. Dépenses publiques et déficit public : une double finalité– Assurer le financement d’infrastructures, d’équipements, de dépenses de santé, d’éducation… pour améliorer l’efficacité économique des entreprises et le bien être de la population. Financement du déficit public : trois types de ressources– Ressources générées automatiquement par le surplus des recettes fiscales, lié à la hausse des revenus, elle-même induite par le déficit (voir plus loin). Contrairement aux ménages et aux entreprises, un État ne disparaît pas et les transferts s’effectuent entre générations, ce qui fait dire à certains « nos enfants paieront » Le déficit public comme instrument de politique économiqueLors de la grande crise des années 20, les politiques de réduction des dépenses publiques eurent des conséquences désastreuses : chômage massif et avènement du fascisme. C’est dans ce contexte qu’un économiste anglais, Keynes a révolutionné la pensée économique en préconisant un déficit des finances publiques en période de sous emploi. Avec une dépense supérieure à ses recettes, l’État injecte des revenus supplémentaires, qui, consacrés à la consommation, alimenteront les débouchés des entreprises et créeront des emplois, générant, à leur tour, de nouveaux revenus, de la consommation etc …. C’est ainsi qu’un surcroît de dépense publique aura un effet multiplicateur sur l’activité et l’emploi, sous deux conditions : La suite de l’histoire économique et de l’évolution du taux d’endettement peut se lire dans la « courbe en U » établie par le FMI, présentée par B TINEL dans « Dette publique : sortir du catastrophisme » Les trente Glorieuses (1945-1975) : Augmentation de la dépense publique et baisse du taux d’endettementA partir des années 50, la reconstruction d’après guerre achevée, les dépenses publiques consacrées aux infrastructures, aux services publics de santé, d’éducation … ne cessent de croître. Le système fiscal se développe avec une grande progressivité pour l’impôt sur le revenu : 14 tranches, un taux marginal à 65%. Quant aux bénéfices des entreprises, ils sont imposés au taux de 50%. L’Etat dispose de marges de manœuvre importantes, pour mener une politique de déficit budgétaire dans les périodes de stagnation économique. Mais le partage de la richesse reste encore très inégal, ce qui contribuera à développer une épargne privée à la recherche de rentabilité et de sécurité. 1976 à nos jours : Pression sur la dépense publique et augmentation du taux d’endettementLes classes dominantes ont accumulé une épargne conséquente qui exige sécurité et rendement: l’objectif de stabilité monétaire devient prioritaire et celui du plein emploi relégué au rang des accessoires. Destruction des instruments de politique économiqueA partir des années 70, les mesures se succéderont visant à réduire les marges d’intervention de l’Etat et à assurer aux épargnants privés des placements sûrs et rentables. Avec la loi de 1973, dite « Pompidou Giscard Rothschild », l’interdiction est faite à l’État de recourir aux emprunts de la Banque de France, livrant la dette publique à la spéculation privée. La loi bancaire de 1984, dérèglemente les activités bancaires ouvrant ainsi les vannes à toutes les dérives financières. Enfin, en 1992, le traité de Maastricht achèvera cette œuvre de destruction du rôle économique des représentants de la Nation. Restructuration de la fiscalitéAU NIVEAU DES PERSONNES : TRANSFERT ENTRE CLASSES FORTUNÉES ET POPULAIRESRéduction de l’impôt progressif sur le revenu : baisse du nombre de tranches et du taux marginal, création de nombreuses niches fiscales. AU NIVEAU DES ENTREPRISES : UNE RÉDUCTION MASSIVE DE L’IMPOSITIONRéduction à 33,33% du taux d’imposition des bénéfices, AU NIVEAU DES PARTICULIERS FORTUNÉS ET DES GRANDS GROUPES : LES PARADIS FISCAUXL’optimisation fiscale flirte avec évasion et fraude, souvent en toute impunité, privant ainsi les Etats de recettes fiscales conséquentes. Cette évolution de la fiscalité favorise les classes les plus aisées et les grands groupes, développant leur épargne spéculative, alors qu’elle pénalise les classes populaires, diminuant leur consommation. L’exemple caricatural des méfaits de ces politiques d’austérité sur l’endettement est fourni par la Grèce : baisse du PIB (- 25% en 7ans), appauvrissement de la population et dégradation du taux d’endettement (de 120% à 180%). Relance et contrainte extérieureLe déficit du commerce extérieurUne relance de la demande dans un seul pays en économie ouverte peut se traduire par un déficit du commerce extérieur, comme ce fut le cas en France en 1981. Depuis, si pour l’ensemble des pays de la zone euro, le commerce extérieur est équilibré, les écarts entre les pays ne cessent de s’aggraver. L’Allemagne dégage un excédent au détriment des autres pays. Par une forte pression sur les salaires ce pays réduit sa demande intérieure pour pirater celle des autres, exportant ainsi une grand part de sa production tout en limitant les importations. Sa structure industrielle est son principal atout pour mener une telle politique. Pour assurer l’efficacité d’une relance dans la zone euro, celle-ci doit s’exercer dans l’ensemble des pays, de manière concertée afin que l’augmentation des importations soit compensée par celle des exportations. La zone euro et la monnaie uniqueL’institution d’une monnaie unique pour des pays à structure économique différente a des conséquences sur les équilibres extérieurs : si le niveau de l’euro est bien adapté à la structure industrielle de l’Allemagne, il est surévalué pour l’ensemble des autres pays. Des mécanismes d’ajustement monétaire à l’intérieur de la zone euro pour pallier l’absence de taux de change devraient être institués, permettant ainsi de restaurer la compétitivité dans chacun des pays de la zone euro. Seule une augmentation de la dépense publique soutenant la consommation, dans le respect de l’environnement et dans le cadre d’une transition énergétique, peut sortir les pays de ce cycle récessif. Et si les ajustements monétaires ou les variations de taux de change au sein des pays européens s’avèrent impossibles, la sortie de l’euro reste la solution ultime. EPILOGUE « DETTE PUBLIQUE : SORTIR DU CATASTROPHISME » BRUNO TINEL, PUBLIÉ AVEC L’AIMABLE AUTORISATION DE L’AUTEUR
SOURCESBruno TINEL, professeur d’économie à l’Université Paris I (Panthéon, Sorbonne Tolbiac) « 1914 – 2014 : Cent ans d’impôt sur le revenu » Mathias ANDRE et Malka GUILLOT Institut des politiques publiques : Notes N°12, juillet 2014 |
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Les véritables définitions économiquesLes finances publiques ne se gèrent ni en « bon père de famille », ni comme « un chef d’entreprise », car la fonction économique de l’Etat est spécifique et différente de celle d’un ménage ou d’une entreprise. Dépenses publiques et déficit public : une double finalité– Assurer le financement d’infrastructures, d’équipements, de dépenses de santé, d’éducation… pour améliorer l’efficacité économique des entreprises et le bien être de la population. Financement du déficit public : trois types de ressources– Ressources générées automatiquement par le surplus des recettes fiscales, lié à la hausse des revenus, elle-même induite par le déficit (voir plus loin). Contrairement aux ménages et aux entreprises, un État ne disparaît pas et les transferts s’effectuent entre générations, ce qui fait dire à certains « nos enfants paieront » Le déficit public comme instrument de politique économiqueLors de la grande crise des années 20, les politiques de réduction des dépenses publiques eurent des conséquences désastreuses : chômage massif et avènement du fascisme. C’est dans ce contexte qu’un économiste anglais, Keynes a révolutionné la pensée économique en préconisant un déficit des finances publiques en période de sous emploi. Avec une dépense supérieure à ses recettes, l’État injecte des revenus supplémentaires, qui, consacrés à la consommation, alimenteront les débouchés des entreprises et créeront des emplois, générant, à leur tour, de nouveaux revenus, de la consommation etc …. C’est ainsi qu’un surcroît de dépense publique aura un effet multiplicateur sur l’activité et l’emploi, sous deux conditions : La suite de l’histoire économique et de l’évolution du taux d’endettement peut se lire dans la « courbe en U » établie par le FMI, présentée par B TINEL dans « Dette publique : sortir du catastrophisme » Les trente Glorieuses (1945-1975) : Augmentation de la dépense publique et baisse du taux d’endettementA partir des années 50, la reconstruction d’après guerre achevée, les dépenses publiques consacrées aux infrastructures, aux services publics de santé, d’éducation … ne cessent de croître. Le système fiscal se développe avec une grande progressivité pour l’impôt sur le revenu : 14 tranches, un taux marginal à 65%. Quant aux bénéfices des entreprises, ils sont imposés au taux de 50%. L’Etat dispose de marges de manœuvre importantes, pour mener une politique de déficit budgétaire dans les périodes de stagnation économique. Mais le partage de la richesse reste encore très inégal, ce qui contribuera à développer une épargne privée à la recherche de rentabilité et de sécurité. 1976 à nos jours : Pression sur la dépense publique et augmentation du taux d’endettementLes classes dominantes ont accumulé une épargne conséquente qui exige sécurité et rendement: l’objectif de stabilité monétaire devient prioritaire et celui du plein emploi relégué au rang des accessoires. Destruction des instruments de politique économiqueA partir des années 70, les mesures se succéderont visant à réduire les marges d’intervention de l’Etat et à assurer aux épargnants privés des placements sûrs et rentables. Avec la loi de 1973, dite « Pompidou Giscard Rothschild », l’interdiction est faite à l’État de recourir aux emprunts de la Banque de France, livrant la dette publique à la spéculation privée. La loi bancaire de 1984, dérèglemente les activités bancaires ouvrant ainsi les vannes à toutes les dérives financières. Enfin, en 1992, le traité de Maastricht achèvera cette œuvre de destruction du rôle économique des représentants de la Nation. Restructuration de la fiscalitéAU NIVEAU DES PERSONNES : TRANSFERT ENTRE CLASSES FORTUNÉES ET POPULAIRESRéduction de l’impôt progressif sur le revenu : baisse du nombre de tranches et du taux marginal, création de nombreuses niches fiscales. AU NIVEAU DES ENTREPRISES : UNE RÉDUCTION MASSIVE DE L’IMPOSITIONRéduction à 33,33% du taux d’imposition des bénéfices, AU NIVEAU DES PARTICULIERS FORTUNÉS ET DES GRANDS GROUPES : LES PARADIS FISCAUXL’optimisation fiscale flirte avec évasion et fraude, souvent en toute impunité, privant ainsi les Etats de recettes fiscales conséquentes. Cette évolution de la fiscalité favorise les classes les plus aisées et les grands groupes, développant leur épargne spéculative, alors qu’elle pénalise les classes populaires, diminuant leur consommation. L’exemple caricatural des méfaits de ces politiques d’austérité sur l’endettement est fourni par la Grèce : baisse du PIB (- 25% en 7ans), appauvrissement de la population et dégradation du taux d’endettement (de 120% à 180%). Relance et contrainte extérieureLe déficit du commerce extérieurUne relance de la demande dans un seul pays en économie ouverte peut se traduire par un déficit du commerce extérieur, comme ce fut le cas en France en 1981. Depuis, si pour l’ensemble des pays de la zone euro, le commerce extérieur est équilibré, les écarts entre les pays ne cessent de s’aggraver. L’Allemagne dégage un excédent au détriment des autres pays. Par une forte pression sur les salaires ce pays réduit sa demande intérieure pour pirater celle des autres, exportant ainsi une grand part de sa production tout en limitant les importations. Sa structure industrielle est son principal atout pour mener une telle politique. Pour assurer l’efficacité d’une relance dans la zone euro, celle-ci doit s’exercer dans l’ensemble des pays, de manière concertée afin que l’augmentation des importations soit compensée par celle des exportations. La zone euro et la monnaie uniqueL’institution d’une monnaie unique pour des pays à structure économique différente a des conséquences sur les équilibres extérieurs : si le niveau de l’euro est bien adapté à la structure industrielle de l’Allemagne, il est surévalué pour l’ensemble des autres pays. Des mécanismes d’ajustement monétaire à l’intérieur de la zone euro pour pallier l’absence de taux de change devraient être institués, permettant ainsi de restaurer la compétitivité dans chacun des pays de la zone euro. Seule une augmentation de la dépense publique soutenant la consommation, dans le respect de l’environnement et dans le cadre d’une transition énergétique, peut sortir les pays de ce cycle récessif. Et si les ajustements monétaires ou les variations de taux de change au sein des pays européens s’avèrent impossibles, la sortie de l’euro reste la solution ultime. EPILOGUE « DETTE PUBLIQUE : SORTIR DU CATASTROPHISME » BRUNO TINEL, PUBLIÉ AVEC L’AIMABLE AUTORISATION DE L’AUTEUR
SOURCESBruno TINEL, professeur d’économie à l’Université Paris I (Panthéon, Sorbonne Tolbiac) « 1914 – 2014 : Cent ans d’impôt sur le revenu » Mathias ANDRE et Malka GUILLOT Institut des politiques publiques : Notes N°12, juillet 2014 |